SCPI : un atterrissage brutal mais des signaux positifs
L’Observatoire des SCPI révèle un atterrissage brutal mais des signaux positifs pour le marché des Sociétés Civiles de Placement Immobilier (SCPI).
L’Observatoire des SCPI révèle un atterrissage brutal mais des signaux positifs pour le marché des Sociétés Civiles de Placement Immobilier (SCPI).
Depuis le début de l’année 2024, les valeurs de reconstitution des SCPI ont baissé de 1,92 %. La catégorie des Bureaux est la plus touchée avec une dépréciation moyenne de 5,23 %, tandis que les autres secteurs restent relativement stables.
La marge entre le prix de souscription et la valeur de reconstitution s’est réduite, passant à -0,10 % en moyenne. Alors que ces dernières années, le marché affichait une décote entre le prix d’achat des SCPI et la valeur de leur patrimoine, les valeurs sont désormais presque à l’équilibre. Plus de la moitié des produits offrent tout de même une marge de sécurité en cas de baisse du marché immobilier, avec une valeur de reconstitution supérieure au prix de souscription.
Environ 5 % des SCPI de l’Observatoire sont susceptibles de voir leur prix diminuer, avec des surcotes significatives supérieures à 7 %. Ces SCPI se trouvent toutes dans la catégorie Bureaux.
Au premier semestre 2024, la collecte brute des SCPI a atteint 2,3 milliards d’euros, un volume comparable à celui du dernier semestre 2023. Le deuxième trimestre 2024 marque toutefois une légère hausse par rapport au premier trimestre, avec une collecte de 1,2 milliard d’euros. Bien que des problèmes de liquidité persistent sur plusieurs produits, le volume d’ordres de rachat a sensiblement diminué d’un trimestre à l’autre, passant de 625 millions d’euros au 1er trimestre 2024 à 412 millions d’euros au 2ème trimestre 2024. Sur ce montant, les trois-quarts ont été compensés par les nouvelles souscriptions.
Au 30 juin 2024, la valeur des parts en attente de retrait représentait 2,6 milliards d’euros, soit 2,9 % de la capitalisation du marché. Ce sont majoritairement les SCPI sans parts en attente qui captent la collecte avec 85 % de l’ensemble des souscriptions au deuxième trimestre 2024.
D’un point de vue sectoriel, le succès des SCPI diversifiées ne se dément pas : elles s’accaparent 63 % de la collecte au T2 (+ 5 points par rapport au T1). Malgré ce contexte de marché chahuté, déjà 10 nouvelles SCPI ont été lancées depuis le début de l’année (et d’autres devraient suivre), preuve que le momentum de marché est idéal pour les acquéreurs. Toutes ces nouvelles SCPI sont diversifiées, pouvant faire preuve d’opportunisme pour investir à bon compte.
Le patrimoine immobilier des SCPI poursuit sa correction. À partir de 2025, les SCPI devront réaliser une évaluation semestrielle de leurs actifs, alors que celle-ci était annuelle jusqu’à présent. La plupart des sociétés de gestion se sont déjà mises en ordre de marché cette année, mais cette évaluation n’étant pas encore obligatoire, nous n’avons pas les données sur l’intégralité du périmètre (75 SCPI sont renseignées sur un périmètre de 83 produits).
Concernant les valeurs de reconstitution établies au 30 juin 2024, nous notons une baisse moyenne de 1,92 % sur le premier semestre sur le périmètre de cet Observatoire. Cinq SCPI, soit 6 % de l’effectif, ont revalorisé le prix de leur part (à date de parution), avec une hausse moyenne de 1,16 %. Il s’agit de : Affinités Pierre (Groupama Gan REIM), Epsilon 360 (Epsicap), Kyaneos Pierre (Kyaneos), Cristal Rente (Inter Gestion) et Iroko Zen (Iroko). Dix-sept SCPI, soit 20 % de l’effectif, ont baissé leur prix de part depuis le début de l’année, avec une baisse moyenne de 11,74 %. Sur ces 17 SCPI, 9 avaient déjà baissé leur prix de part en 2023.
Parmi elles, 7 SCPI affichent des baisses cumulées de 20 % ou plus depuis 2023. Les SCPI avec les capitalisations les plus importantes sont les plus impactées par ces baisses. Les fonds avec une capitalisation supérieure à 1 milliard d’euros affichent un recul de 10,77 % en moyenne contre -2,24 % pour les capitalisations inférieures à 1 milliard d’euros. Cela s’explique par le fait que ces SCPI sont souvent pénalisées par leur « stock » important de biens acquis par le passé.
La baisse constatée n’est pas homogène dans toutes les catégories et touche essentiellement les supports investis dans des bureaux (-5,23 %). C’était déjà notable l’an dernier mais le phénomène est beaucoup plus marqué cette année. Les autres catégories affichent des valeurs de reconstitution relativement stables avec de légères baisses, voire même une légère progression pour les SCPI résidentielles. Le secteur des Bureaux est le plus sinistré : en moyenne, les prix de part affichent une surcote de 1,50 % par rapport aux valeurs de reconstitution, et ce malgré les baisses de prix intervenues à date.
Au-delà du télétravail et du décret tertiaire qui contraint les propriétaires à diminuer la consommation énergétique de leurs bâtiments d’au moins 40 % d’ici 2030, certains véhicules sont pénalisés par un taux de vacance croissant et un taux d’endettement élevé. Le marché du bureau n’étant pas encore totalement reparti, certains actifs intègrent des décotes pour illiquidité dans la valorisation du patrimoine de certaines SCPI. Quelques supports sont à surveiller car ils affichent des prix de part bien supérieurs à la valeur de leur patrimoine. Enfin, la plupart des problèmes de liquidité des SCPI sont concentrés sur ce secteur.
Nous observons une légère baisse dans la catégorie des Commerces (-0,88 %), qui conserve néanmoins une décote moyenne de 0,84 %. Le secteur ne suscite pas d’inquiétude particulière à ce niveau mais la collecte reste faible et des problèmes de liquidité persistent sur certaines SCPI de cette catégorie comme Patrimmo Commerce (Primonial), Aestiam Pierre Rendement (Aestiam) ou encore Ficommerce (Fiducial Gérance). Là aussi on constate une légère baisse de 0,47 % dans la catégorie des SCPI diversifiées, mais la décote de 1,08 % reste rassurante.
Cette catégorie concentre l’essentiel de la collecte. A noter que toutes les SCPI lancées depuis le début de l’année sont des SCPI diversifiées. Le résidentiel confirme sa résilience. Il est le seul secteur à afficher des valeurs de reconstitution en hausse (+0,39 %), avec la décote moyenne la plus importante du marché (2,11 %). Même si la catégorie spécialisée est en légère baisse dans son ensemble (-0,46 %), elle ne suscite pas d’inquiétude particulière. La santé et la logistique continuent de collecter alors que l’hôtellerie est à la peine.
Malgré cette baisse généralisée des valeurs, les SCPI conservent en moyenne un prix de part décoté de 0,10 % par rapport à leurs valeurs de reconstitution, tous secteurs confondus. Cela signifie que les souscripteurs achètent aujourd’hui leurs parts en moyenne 0,10 % moins cher que la valeur réelle des biens détenus. Pour rappel, ce chiffre se montait à 2,45 % lors de notre Observatoire de juin 2023 (basé sur les valeurs de fin décembre 2022).
Sur les SCPI observées, 39 d’entre elles – soit 47 % de l’effectif – affichent un prix de part supérieur ou égal à leur valeur de reconstitution (contre 25 % l’an dernier). Elles sont identifiées en rouge dans le tableau situé en annexe. À contrario, 53 % de l’effectif affiche un prix de part inférieur ou égal à la valeur de reconstitution. Elles sont identifiées en vert dans le tableau.
Parmi ces SCPI, 92 % ont une décote inférieure à 5 %. Pour 8 % d’entre elles, la décote est comprise entre 5 et 7 %. Enfin, 13 % d’entre elles enregistrent une décote de plus de 7 %, ce qui représente 5 SCPI. Ces dernières sont les plus susceptibles de voir leur prix de part revalorisé à court ou moyen terme. Elles sont identifiées en vert foncé dans le tableau.
En conclusion, le marché des SCPI est en profonde mutation. La baisse des valeurs d’expertise enregistrée sur les six premiers mois de l’année conduit actuellement à une situation où les prix sont le reflet plus ou moins exact de la valorisation des patrimoines, la décote moyenne s’élevant à 0,10 % par rapport aux valeurs de reconstitution. Sans surprise, le secteur du bureau est le plus touché et concentre l’essentiel des problèmes de baisse de prix de part comme de liquidité. L’environnement comporte tout de même des signaux encourageants.
Ainsi, le contexte macroéconomique s’améliore avec la baisse des taux directeurs enclenchée au mois de juin. D’autres baisses sont attendues dans les prochains mois. Cela pourrait être pénalisant pour d’autres produits d’épargne (livrets, fonds en euro, obligations…) et permettre aux SCPI de retrouver, comparativement, une prime de risque plus attractive, d’autant que certains taux de distribution 2024 devraient être très élevés. Le marché reste très dynamique du côté de l’offre avec le lancement de nombreuses nouvelles SCPI.
Cette inflation de produits soulève plusieurs questions. Dans un marché déjà très concurrentiel, comment toutes ces nouvelles SCPI avec des stratégies relativement similaires vont-elles arriver à se différencier et à trouver leur public ? Par ailleurs, cette profusion de nouveautés ne doit pas conduire à oublier les anciens produits, en particulier ceux en difficulté. Comment les sociétés de gestion vont-elles résoudre leurs problèmes de liquidité ? Différentes options sont sur la table, en l’état actuel de la réglementation : création de fonds de liquidité, fusion/absorption par d’autres véhicules en meilleure santé, dissolution…
Enfin, des nouveautés ont été mises sur la table par l’ordonnance 2024-662 du 3 juillet 2024. Cette dernière prévoit différentes améliorations du produit : elle permet aux SCPI d’investir dans des équipements nécessaires à l’exploitation des biens et des systèmes de production d’énergies renouvelables, ce qui représente de nouvelles sources de revenus et des équipements qui répondent à la demande croissante de durabilité. Elle impose également la publication biannuelle de la valeur de leurs actifs, ce qui renforce la transparence du produit.
Enfin, elle supprime le montant nominal minimal des parts de SCPI et introduit de nouvelles catégories de parts, afin d’améliorer l’accessibilité de ce placement et mieux l’adapter aux besoins des différents types d’investisseurs.
Source : Pierre GARIN, Directeur du pôle immobilier de Linxea, Octobre 2024.