19 Mar

Tout savoir sur la donation avec réserve d'usufruit

La loi de finances pour 2024 a incorporé un amendement du Sénat qui interdit la déduction des dettes de restitution liées aux donations de sommes d’argent lorsque le défunt en avait conservé l’usufruit.

La loi de finances pour 2024 a incorporé un amendement du Sénat qui interdit la déduction des dettes de restitution liées aux donations de sommes d’argent lorsque le défunt en avait conservé l’usufruit. Désormais, la valeur de la dette de restitution est soumise aux droits de succession.

 

Le démembrement de propriété consiste à diviser la pleine propriété d’un bien entre le nu-propriétaire (qui détient le bien) et l’usufruitier (qui a le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les revenus). Dans le cadre d’une donation, le donateur peut conserver l’usufruit du bien et transmettre la nue-propriété à ses héritiers. Ce mécanisme est avantageux sur le plan fiscal, car il permet de réduire les droits de donation, qui sont calculés uniquement sur la valeur de la nue-propriété et non sur la pleine propriété.

 

Au décès de l’usufruitier, les nus-propriétaires récupèrent la pleine propriété du bien sans formalités. L’article 1133 du Code général des impôts (CGI) précise : « La réunion de l’usufruit à la nue-propriété ne donne lieu à aucun impôt ou taxe lorsque cette réunion a lieu par l’expiration du temps fixé pour l’usufruit, ou par le décès de l’usufruitier ».

 

Démembrement de propriété et usufruit : le cas des sommes d’argent et des biens consommables

 

Le démembrement de propriété peut concerner :

• Un bien immobilier,
• Un portefeuille de valeurs mobilières,
• Une somme d’argent ou tout autre bien consommable. Il s’agit d’un bien dont l’utilisation entraîne sa consommation. On parle alors de quasi-usufruit.

 

La donation de la nue-propriété d’une somme d’argent est régie par l’article 587 du Code général des impôts. Celui-ci stipule que l’usufruitier peut utiliser la somme d’argent, mais qu’il doit la restituer à valeur égale à la fin de l’usufruit (généralement à son décès et donc à l’ouverture de la succession). Cette dette de restitution, auparavant déductible de l’actif successoral du quasi-usufruitier, permettait à l’héritier de bénéficier d’une restitution des sommes dépensées sous forme de déduction fiscale sur la valeur de la succession (article 768 du CGI).

 

Fin de la déductibilité de la dette de restitution : une mesure contre les abus

 

La loi de finances pour 2024 met fin à la déductibilité de la dette de restitution de l’actif successoral du quasi-usufruitier. Ce type de montage est considéré comme un abus à des fins d’optimisation fiscale. Les auteurs de l’amendement expliquent : « Alors que la somme d’argent démembrée n’a été soumise aux droits de donation qu’à hauteur de la valeur de la nue-propriété lors de la mutation entre vifs, la déduction de l’actif successoral de cette dette pour son montant total en pleine propriété constitue une incohérence qu’il convient de corriger ».

Points à retenir

 

Cette mesure anti-abus s’applique aux successions ouvertes à compter de la promulgation de la loi de finances pour 2024, soit le 29 décembre 2023.

De plus, la donation d’une somme d’argent avec réserve d’usufruit ne peut être assimilée à un transfert de propriété. Contrairement à un démembrement classique, où le nu-propriétaire détient un droit réel sur le bien donné, le nu-propriétaire d’une somme d’argent possède une créance de restitution à l’égard du quasi-usufruitier. Ce dernier peut donc disposer de la somme d’argent et la consommer comme un propriétaire, tandis que le nu-propriétaire ne détient pas cette somme en tant que telle.

Désormais, la dette de restitution ne peut plus être déduite de la succession. Le nouvel article 774 bis du CGI prévoit un calcul des droits de mutation sur la valeur de cette dette de restitution. Pour éviter une double imposition, les droits acquittés lors de la constitution initiale de l’usufruit peuvent être imputés sur les droits de succession.